Le John Muir Trail et ses 340 km de randonnée dans la Sierra Nevada californienne…
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3 semaines de trek sur le John Muir Trail : partie Sud
Suite de notre aventure de l’été 2022 sur le John Muir Trail ! Après 10 jours de marche dans la Sierra Nevada, la moitié du parcours est désormais derrière nous. Mais l’expédition est loin d’être terminée pour autant : il nous reste les cols les plus hauts et les plus difficiles à franchir. Et, paraît-il, les plus beaux endroits du trek à découvrir…
Les merveilles de King’s Canyon
J11 : Evolution Valley et Evolution Lake
Un départ compliqué
Top départ d’une étape que nous attendions avec impatience ! Evolution Valley et le lac éponyme sont censés être des joyaux du John Muir Trail. Il s’agit d’ailleurs, paraît-il, de l’endroit préféré du fameux John Muir. Sur les conseils de locaux croisés le premier jour, nous avons donc prévu une étape plutôt courte afin de profiter du lac tout l’après-midi.
Sauf que je me réveille dans un état de fatigue avancé, avec des vertiges qui me font un peu peur. Une demi-heure après avoir commencé à marcher, mon état ne s’améliore pas. C’est l’angoisse, d’autant que continuer reviendrait à s’engager sur plusieurs jours de marche avant la prochaine sortie possible. L’autre solution : revenir sur nos pas pour atteindre le Muir Trail Ranch et abandonner le trek. C’est en pleine pause délibération que nous nous faisons rattraper par Joel, Dave et Ross, trio américain avec lequel nous avons partagé un bivouac il y a quelques jours. Parler d’autre chose me fait du bien, et nous décidons de monter au moins jusqu’au lac, histoire de ne pas avoir de regret – quitte à faire demi-tour le lendemain. En espérant qu’une demi-journée de repos là-bas me remette d’attaque.
Vers Evolution Lake
L’arrivée du soleil ainsi qu’un franchissement de rivière à gué finissent en tout cas de me réveiller, et c’est avec la tête plus claire que je reprends la montée vers Evolution Lake. L’endroit, paisible et verdoyant, est très agréable. Nous découvrons l’impressionnant Hermit, qui semble bien haut mais dont la cime est pourtant dépourvue de neige. Après la pause déjeuner, la montée se fait plus rude et nous semble interminable. C’est finalement avec un peu de retard que nous arrivons aux abords du lac en début d’après-midi.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le lieu tient ses promesses : ce lac entouré de falaises aux reliefs atypiques nous en met plein la vue. Et bonne surprise, nous sommes seuls sur les lieux. Nous nous délectons donc de la vue et du soleil radieux tout l’après-midi, en ne faisant absolument rien. Voilà qui requinque !
J12 : la journée de trek parfaite autour de Muir Pass
Cette matinée va nous prouver que nous avons pris la bonne décision la veille. Pour commencer, je me réveille sans aucun vertige, et nous pouvons donc poursuivre le John Muir Trail en toute quiétude. Mais surtout, alors que nous filtrons de l’eau au lac avant le départ, nous apercevons une bête en mouvement sur la rive d’en face… Pas de doute, il s’agit d’un ours ! Voilà qui explique le mystérieux fracas entendu près de notre tente à la nuit tombée. À l’abri de l’autre côté du lac, nous observons l’ours courir et nager d’un air déterminé vers le bivouac d’un groupe de pêcheurs, qui doit manifestement dégager une odeur alléchante… avant de faire demi-tour, paniqué, à la vue desdits pêcheurs. Un vrai sketch ! Après un petit quart d’heure de spectacle, nous démarrons notre route, le sourire jusqu’aux oreilles.
Le reste de la journée se déroule aussi bien qu’elle a commencé : grand soleil et paysages de rêves nous accompagnent toute la matinée sur la montée à Muir Pass (3 650 m). Juste avant le col, les petits lacs silencieux dans un environnement gris et rocailleux nous donnent l’impression d’être sur la Lune. Alors qu’à la descente, la roche rouge nous fait passer sur Mars. Nous en prenons plein la vue, et c’est fatigués mais satisfaits que nous finissons la journée en bas de vallée.
J13 : Golden Staircase et les Palisade Lakes
Matinée tranquille aujourd’hui, sur un faux-plat montant boisé qui n’a pas grand intérêt si ce n’est qu’il se parcourt facilement. En revanche, les choses se gâtent à midi à l’arrivée en bas du Golden Staircase, qui, comme son nom l’indique, est une montée très sèche, qui zigzague à flanc de montagne et est 100 % exposée au soleil. Ça tombe bien, nous arrivons en plein cagnard ! Mais bon, après nos mésaventures orageuses de la semaine passée, nous ne pouvons pas nous plaindre de cette météo. Alors on serre les dents, et on monte !
Quelques heures plus tard, nous arrivons finalement au premier des lacs Palisade, alors qu’un amas de nuages sombres s’amassent au-dessus de nous. Nous poursuivons la montée jusqu’au niveau du deuxième lac, au-dessus duquel nous trouvons un spot de bivouac qui nous semble bien sécurisé en cas d’orage. Mais fausse alerte, le beau temps revient, et après une bonne lessive nous pouvons nous délasser sans vergogne.
J14 : Mather Pass
C’est sous un soleil éclatant que nous démarrons la journée en direction de Mather Pass (3 688 m). Le col n’est plus très loin, mais la montée n’en est pas facile pour autant ! Ça grimpe sec dans la rocaille. Heureusement, la vue en haut en vaut la peine.
La descente est très agréable et nous conduit en bord de rivière, endroit parfait pour un déjeuner ensoleillé. Enfin, nous reprenons de la hauteur dans l’après-midi pour nous rapprocher du col du lendemain. Nous plantons la tente un peu avant le lac Marjorie, près d’un lac plus petit, dans un cadre splendide. Cerise sur le gâteau : nous profitons de notre solitude pour nous baigner dans une eau étonnamment bonne, c’est le pied !
J15 : Pinchot Pass
À nouvelle journée, nouveau col ! Il faut croire que l’on s’habitue, car la montée vers le Pinchot (3 673 m) passe comme une lettre à la poste. La beauté de l’endroit aide : avec ses couleurs orangées, ses lacs et une lune éclatante au-dessus, ce passage de col reste l’un de mes préférés du parcours.
La longue descente dans les gorges est toute aussi magnifique, mais c’est épuisés que nous arrivons en bas en début d’après-midi. Nous nous arrêterions bien ici, mais si nous ne voulons pas d’une journée infernale le lendemain, nous devons poursuivre. C’est parti donc pour 500 mètres de dénivelé positif supplémentaires jusqu’au très joli Dollar Lake. En dépassant un peu ce dernier, très peuplé, nous trouvons un spot de bivouac incroyable sur les hauteurs. Les montagnes en face sont magnifiques et des nuages roses en fin de soirée viennent conclure le spectacle en apothéose. Et puis, l’objectif final semble désormais atteignable, ce qui est assez satisfaisant !
La région d’Onion Valley et le Mont Whitney
J16 : Glen Pass
Nous faisons les marmottes ce matin et ne commençons à randonner qu’à 8h. Le plateau sur lequel nous nous trouvons est charmant : lacs, fleurs, biches… on se croirait dans un Disney. Mais nous allons bientôt retrouver la rocaille en montant vers Glen Pass (3 635 m). Nouveau point de vue époustouflant au rendez-vous. C’est qu’on s’y habituerait presque !
À la descente, nous sommes surpris par le monde que l’on croise : nous n’avions plus connu ça depuis les premiers jours dans le Yosemite. Peut-être est-ce dû à la proximité avec Onion Valley, une des portes d’entrée par lesquelles les permis sont plus faciles à obtenir ? Nous poursuivons en tout cas notre route pour nous rapprocher du dernier col de notre trek et nous arrêtons juste à temps en pleine forêt : voilà la pluie qui fait son grand retour ! Pas de tonnerre heureusement, et après avoir creusé des rigoles autour de la tente pour que l’eau ne s’accumule pas dessous, nous pouvons nous endormir tranquilles.
J17 : Forester Pass
C’est par un temps maussade ponctué de petites averses que nous entreprenons une étape symboliquement importante : le Forester Pass est le dernier et le plus haut col du John Muir Trail (du Pacific Crest Trail aussi pour la hauteur, d’ailleurs), du haut de ses 4 011 mètres d’altitude. Première fois que nous allons franchir cette barre symbolique !
La montée est d’autant plus longue qu’elle n’est pas très pentue, et ne présente pas d’intérêt particulier visuellement (enfin, tout est relatif). Avec un peu de patience, nous finissons par arriver au col, bien essoufflés – le manque d’oxygène se fait un peu sentir.
Nous ne nous attardons pas en haut, car une belle perturbation s’annonce. À nouveau, cela ne restera que de la pluie. Nous trouvons un spot de bivouac sympathique aux Tyndall Frog Ponds dans l’après-midi, et profitons d’un beau coucher de soleil sur les montagnes entre deux averses.
J18 : étape de transition dans Sequoia National Park
Au programme du jour, une étape plutôt tranquille avant la grande ascension du Mont Whitney. Depuis le Forester, nous sommes officiellement entrés dans l’un des parcs emblématiques de l’Ouest américain : Sequoia National Park. Et nous nous retrouvons effectivement en forêt parmi les séquoias une fois passé le tout pelé Bighorn Plateau.
Une journée assez tranquille en somme, avec un dénivelé raisonnable, mais tout de même marquée par quelques nouvelles rencontres avec nos amis à quatre pattes : un cerf, un coyote et un adorable chipmunk qui tente de nous piquer une barre de céréale lors de notre dîner à Guitar Lake.
Beaucoup de monde bivouaque près du lac en vue de monter le Whitney le lendemain matin. Cette ascension finale fait un peu peur, d’autant que les rangers craignent un nouvel orage – il ne faudrait pas être en haut lorsqu’il éclatera… Nous visons de toute façon d’être au sommet pour le lever du soleil, et mettons le réveil à 2h du matin. Ça va piquer. Au moins, nos sacs seront plus légers que jamais : nous arrivons au bout de nos provisions, on a super bien calculé notre coup. Plus qu’un jour !
J19 : le Mont Whitney et la fin de l’aventure
L’ascension
Avec un niveau d’excitation au plus haut, nous nous réveillons en fait facilement. Le temps de manger, de plier bagage et de filtrer suffisamment d’eau pour tenir jusqu’à la fin de la journée, c’est finalement à 3h que nous décollons, à la lumière de nos frontales.
Randonner de nuit est une expérience à vivre : l’atmosphère est radicalement différente, et ne pas pouvoir se fier à sa vue pour s’orienter est assez déroutant. Nous arrivons à Trail Crest (4 085 m), le col situé juste sous le sommet, en quelques heures. Nous avons mis un peu plus de temps qu’espéré, et c’est finalement en route vers le sommet que nous observons par intermittence un magnifique lever de soleil aux teintes d’orange et de violet sur le désert. On fait difficilement mieux !
Mais nous ne sommes pas encore au bout de nos peines. Les dernières centaines de mètres de dénivelé positif ne sont pas une mince affaire, et c’est bien fatigués que nous arrivons vers 6h30 au sommet du Mont Whitney, plus haut sommet des États-Unis contigus (hors Alaska donc) avec ses 4 417 mètres d’altitude. Moment d’émotion… après tous ces efforts et ces doutes, nous y sommes arrivés ! C’est la fin officielle du John Muir Trail. Une petite séance photo s’impose, suivie de la traditionnelle signature du registre de la cabane sommitale. Après avoir profité du moment comme il se doit, nous redescendons vite, parce qu’il faut bien le dire : il gèle là-haut !
La descente vers Whitney Portal
Une bonne surprise nous attend en redescendant vers le col : nous croisons Joel, Dave et Ross, qui sont aussi ravis que nous de voir que nous sommes tous allés au bout. Cette rencontre met un beau point final à l’aventure. Enfin, pas si final que ça, puisqu’il nous reste près de 2 000 mètres de dénivelé négatif à avaler d’une traite.
C’est long, très long, mais le soleil est au rendez-vous et nous sommes – est-il utile de le préciser ? – d’excellente humeur. Nous nous accordons le luxe d’une sieste après la pause déjeuner à Mirror Lake, et faisons une dernière belle rencontre sur la fin de la descente : une biche et son faon qui passent juste à côté de nous ! Je fonds.
Enfin, nous arrivons en milieu d’après-midi à Whitney Portal, sorte de camping-parking d’entrée vers le Mont Whitney. Glace, soda puis bières et burgers : nous fêtons la fin avec les moyens du bord, et cela nous paraît déjà extraordinaire. Nous aurons l’occasion de faire les choses bien en ville le lendemain. D’ici là, c’est une dernière nuit en tente qui nous attend…
Tentés par le John Muir Trail ? On vous prépare un dernier article avec tous nos conseils pratiques et notre bilan de l’aventure. À bientôt !
Un grand bravo à vous deux pour vôtre John Muir Trail ‘s INCONFORT !!! Contente de lire en français ce périple magnifique…. que j’ai suivi sur Yutube en anglais.
Passionnée pour l’histoire de cet homme et donc de protection de la nature … cela restera un rêve sûrement…j’ai déjà 60 ans et ne randonne qu’en moyenne montagne. Cependant nous pouvons toujours le tenter pour une partie du Trail finalement ! Ou à la journée….
Merci de votre blog ! Belle continuation dans vos magnifiques périples !
Corinne du pacifique (nouvelle Calédonie)
Bonjour Corinne,
Merci beaucoup pour votre message ! Nous avons croisé des gens de tous les âges sur le John Muir Trail, si vous en avez envie vous pouvez le faire (en partie aussi bien sûr) !
D’ici là profitez bien de la Nouvelle-Calédonie, cet endroit a l’air incroyable, vous avez de la chance.
Merci encore et belles randos à vous !